Amazon fête ses 20 ans, 20 bougies pour une histoire d’entreprise pas comme les autres. Depuis le lancement à Seattle dans un garage, ce qui devait devenir la multinationale de Jeff Bezos a fait bien du chemin.

Pour mieux comprendre cette entreprise nous avons décidé de faire témoigner des anciens d’Amazon, les Amazoniens dans le jargon local. Rendez-vous ici tous les jours à 10 h pour découvrir ces différentes expériences.

Les « Amazing Amazonians » parlent et racontent, des témoignages exceptionnels et rares !
Amazonien – Témoignage N°2

Aujourd’hui, c’est Jérôme Rey qui raconte son expérience. Il occupait au lancement d’Amazon le poste de Directeur Bases de données Musique, il est actuellement auteur et traducteur.

«Je rejoins Amazon en janvier 2000, 9 mois avant l’ouverture du site.
Le premier souvenir qui me vient à l’esprit c’est l’impression de rejoindre une société secrète. Paranoia totale des américains sur la communication et sur la divulgation de la moindre information à la presse et aux futurs fournisseurs.
On vit retranché, planqué en banlieue. Les fournisseurs rencontrés doivent signer des accords de confidentialité au moment où on leur remet un badge pour pénétrer dans les locaux. Motus sur les objectifs, les chiffres, la date de lancement, tout est secret défense.

Le second souvenir c’est le professionnalisme, l’efficacité redoutable des américains, l’impression de vivre un projet unique avec des équipes brillantes. Le sentiment d’assister à un second débarquement américain avec une volonté profonde d’inventer le commerce du XXIème siècle et de le révolutionner. Souvenir aussi d’objectifs furieux pour le lancement d’Amazon.fr et une obsession quotidienne et permanente: le client. Tous les jours on nous rabâche que nous sommes “The most consurmer centric company in the world” et que c’est toujours “Day1»

Verbatim de la responsable américaine du lancement du site français lors d’une réunion en septembre 2000 quelques jours après l’ouverture officielle du site : “on ne vous met pas la pression mais à Noel vous devez avoir au moins 45% de part de marché.”

Une équipe française formidable la première année avec un management humain, des personnes ultra-motivées embarquées dans une aventure unique.

Février 2002, le retour de bâton est douloureux. Tout le management est jeté par les américains. Changement total d’atmosphère. Un premier plan social au bout de 9 mois d’activité est initié. Les américains comprennent mal qu’un plan social se négocie, se discute, que des procédures légales doivent être respectées. Reprise en main par les américains et arrivée d’un PDG détestable au plus haut point.
Jamais je n’ai senti une atmosphère aussi glaciale lors de la réunion où il nous a été présenté. Sa réputation l’avait précédé. On savait qu’il était là pour faire le ménage. Cela se confirmera quotidiennement par ses méthodes, son style brutal.

Souvenir de comité de direction où chaque semaine invariablement il s’acharne à tour de rôle sur un des membres présents à cette réunion.
Il l’humilie, le ridiculise, vocifère avec un plaisir non feint devant le reste de l’équipe. Un dangereux psychopathe. Un être furieux au regard fuyant, hautain, dédaigneux, exécrable, incapable d’écouter, de vous laisser parler, de prendre en compte nos remarques si celles-ci ne lui conviennent pas.

Une ambiance délétère s’installe avec un climat de profonde détestation entre les différentes équipes, chacun essaie de sauver sa peau

avant un autre grand plan social qui fera la une de Libération au grand dam de la direction américaine de la communication. Les 3/4 des effectifs sont mis dehors avec le sentiment d’un immense gâchis.»

Retrouvez le témoignage N°1 de Stéphane Jauffret, N°3 Florian Pittion, N° 4 Jean-François Guillaud