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Vieux Os un roman qui répare les rêves cassés – Interview

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Ariane Payen publie son second roman aux Editions Lion Z’Ailé. Après Sitatunga voici Vieux Os.

Vieux Os mérite qu’on s’y arrête. Un livre de plus me direz-vous ? Pas du tout, Vieux Os c’est un moment de lecture à part dans lequel on entre d’abord par la petite porte du village pour faire connaissance avec une palanquée de personnages étonnants.
Grinçant, piquant, émouvant, Vieux Os concentre cela et plus encore !

Ariane Payen s’est prêtée au jeu des questions réponses. Elle nous parle de son livre bien sûr mais aussi de son ou de ses chemins d’écriture.

Vous publiez votre second livre aux Editions du Lion Z’ailé pourquoi avoir choisi cette maison d’édition ?

C’est un livre qui a une longue histoire. J’ai commencé à l’écrire au cours d’un atelier d’écriture « roman » en septembre 2008. En juin 2009, mission accomplie, le premier jet était déposé. Je me suis attelée à la relecture, à la réécriture. Je l’ai fait lire par des professionnels et par mon entourage.

Je me suis sentie déboussolée et découragée, les commentaires partaient dans tous les sens. Je l’ai laissé dans le fond d’une armoire, mais Vieux Os se rebellait dans son placard. Parfois il me suppliait de le laisser évoluer à l’air libre ; parfois il m’insultait en soulignant ma lâcheté ; parfois il menaçait de me dénoncer à SOS livres maltraités… mais il ne se résignait pas. Plusieurs fois, je l’ai pris dans les bras, regardé dans le fond des yeux. Un jour où l’on faisait le point avec Yasmina Bouko sur la mise en place sur le marché de Sitatunga, j’ai su qu’elle avait elle aussi son livre du fond du tiroir et il n’était pas plus heureux que le mien.

Je lui ai confié la version initiale et les quatre premiers chapitres retravaillés. Elle m’a dit « j’adore » et « hors de question de retravailler dans ce sens-là ». Elle l’a donné à un comité de lecture spécial, en mode « travail en cours ». Il n’a pas été unanime, mais les retours ont aidé mon éditrice de chic et de choc à asseoir sa décision et à me donner une direction plus claire. On était en janvier 2022. En juin je lui livrais la version « finale » et en novembre il sortait. Et vous me demandez pourquoi j’ai choisi le Lion Z’Ailé ?

Si vous deviez parler et donner envie à une personne de lire Vieux Os, que lui diriez-vous ?

Il y a plein de personnages, qui vivent dans un village assez banal. Et en même temps, chacun des personnages est un peu spécial. Chacun a un rêve cassé qu’il doit réparer, une chance à saisir ou une revanche à prendre.

A force de se croiser entre le zoo, la maison de repos et le café en face de l’église, ils vont créer des liens. Finalement, c’est une façon de mettre à l’honneur le « vivre ensemble ». Et il me semble qu’on ne s’ennuie pas.

Le journal Metro comme inspiration

Jean Pol, Nathalie, Ginette Paulette… sont tous des personnages hauts en couleurs, où puisez-vous votre galerie de portraits ?

Je prenais souvent le train à l’époque et dans le journal « Metro » qu’on trouvait gratuitement dans les gares, il y avait plein de mini articles avec des faits divers hétéroclites. Moi qui ai toujours détesté lire le journal, écouter la radio ou regarder le journal parlé (cela me file des angoisses), je me surprenais à éplucher cette feuille de chou à la recherche d’informations insolites. Je les découpais et les collais dans de petits carnets. Je me suis inscrite à cet atelier d’écriture et j’ai embarqué les carnets. Quand il a fallu créer les portraits, j’ai choisi pour chacun.e les faits divers qui collaient avec son caractère.

Vous êtes scénariste, l’écriture du scénario est-elle différente de celle d’un livre ?

Oui, c’est différent, dans la mesure où, dans mon cas, c’est un travail de commande. Il y a un concept de série (en l’occurrence de dessin animé), un format (7 minutes, 13 minutes, 26 minutes…), un public (enfants de maternelle ou de primaire) et je dois proposer des idées d’épisodes. Il y a une structure préétablie, un univers spécifique, un nombre de décors, de personnage, d’effets spéciaux à ne pas dépasser. Il faut d’abord proposer une idée qui tient en une phrase, le pitch. Si elle est retenue, on déploie le synopsis en une page et puis seulement on écrit les dialogues. A chaque étape, plusieurs intervenants approuvent (ou pas) et on attend le feu vert pour passer à la suivante.

Du coup il faut d’abord mettre de l’ordre dans les idées et les enchainements. Et puis écouter les commentaires et repartir sur le projet en tentant de garder une certaine fraîcheur pour être en mesure de rebondir.

Or, moi, ce qui m’aide à découvrir une histoire, c’est d’écrire en long et en large la situation de départ, de voir comment les personnages prennent vie dans ladite situation et d’imaginer ce qui va leur arriver. Souvent, pour écrire le synopsis, je me lance à corps perdu dans cette première scène comme si c’était un roman et une fois que je sais ce qui se passe, alors seulement je reviens au synopsis et je fais l’exercice de résumer. Je garde tout bien au chaud, car c’est la source qui alimentera ensuite les étapes ultérieures quand je donnerai de la chair.

Non, ce n’est pas différent, car on est dans le « donner à voir ». Quand on écrit du scénario, il faut montrer ce qui se passe. On a droit à une caméra et un micro. On n’a pas plein de place pour expliquer ce que ressent ou pense le personnage. On doit écrire des dialogues qui sonnent très juste. On doit induire une suite logique entre les scènes sans être ni redondant ni lourd. Et tout cela, c’est précieux quand on écrit du roman.

Une chroniqueuse a dit que Vieux Os était très scénarisé et je l’ai pris comme un joli compliment. Je me dis qu’elle a apprécié les rebondissements, qu’elle a eu le sentiment que rien n’était là par hasard et surtout, qu’elle a eu des images dans la tête et sans doute même des voix…

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Pourriez-vous nous expliquer comment vous travaillez ?

D’abord, un morceau d’idée vient. Puis un autre. Je les note plic-ploc dans mon journal et je fais des traits hachurés dans la marge pour les retrouver facilement. Au bout d’un moment (ça peut prendre des mois), il y a suffisamment de bouts d’idées pour tenter de les mettre ensemble. Alors j’ouvre un fichier Word sur mon ordinateur et je tente d’organiser les informations glanées à gauche et à droite.

Souvent, ça ne fait pas encore vraiment sens, mais le fait qu’une part de moi a décrété qu’il y avait suffisamment de matière pour donner lieu à un projet me rend assez prolifique. A cette étape, étrangement, les petits morceaux d’idées s’agencent de manière beaucoup plus intelligible que je ne le pensais et je fabrique de la colle à idées.

Je me retrouve avec un « concept ». Finalement, un peu comme pour le scénario. J’ai un « pitch », j’ai des personnages, j’ai un lieu et un début de squelette d’histoire. Je vois à peu près le message que j’ai envie de faire passer avec le projet. Quand je referme le fichier, je suis convaincue que j’ai une histoire complète, mais ce n’est absolument pas le cas.

Puis un jour où je suis d’une humeur particulièrement joyeuse, je décide sur un coup de tête d’écrire une scène et je fais interagir mes personnages. En fait, je les teste. Je les observe avec curiosité et j’attends qu’ils se mettent à discuter. Une fois que c’est parti, j’agite mes neurones et mes doigts pour qu’ils écrivent assez vite.

C’est quasi toujours un dialogue kilométrique qu’il me faudra découper et réécrire partiellement en narration, mais c’est le top départ du projet.
Au bout d’un moment je cale. Je ne sais pas ce qui se passe pour mon héros, je suis au bord du vide. Ce que je pensais être structuré ne l’est plus du tout, j’ai le sentiment d’écrire la même scène dix fois, de pédaler dans la semoule. C’est le moment de choisir une structure spécifique (je vais piocher dans les théories du scénario : Vogler – 12 étapes ; Save the Cat – 15 étapes ou Tuby – 22 étapes) et un jeu de tarot dont le graphisme est dans l’esprit du projet. Munie de ces deux outils, je mélange les cartes majeures et j’en alloue une par étape. Et je m’attaque au plan. Je note tout ce qui s’est déjà passé, ce qui est écrit et tout ce que je sais qui va se passer et qui n’est pas écrit.

La théorie des étapes ET les cartes que je leur alloue me donnent plein d’informations et me soufflent des idées pour boucher les trous. En général, ça me prend deux jours pleins dont je sors épuisée, mais heureuse. J’ai la conviction intime que j’ai tout cette fois, qu’il n’y a plus qu’à… mais mes personnages vivent leur vie et il y a plein de surprises tapies dans tous les coins si bien qu’il y a toujours un moment où je me sens à nouveau coincée et où je reprends mon super plan qui n’a plus rien de super…

Je le mets à jour en fonction de ce qui a été écrit, je vérifie que c’est cohérent, que c’est toujours bien l’histoire que je veux raconter, que le message est toujours le même et je mesure la taille des trous dans le tricot. Je fais le tri. J’enlève ce qui ne va plus, j’ajoute d’autres choses que j’ai semées « sans le voir » au fil des chapitres. Car oui, dans ces moments-là, je me relis ! Voilà comment je travaille.

Vous animez des ateliers d’écriture, en quoi cela consiste ?

Ce sont des ateliers d’écriture créative. Les gens viennent pour écrire une nouvelle, un conte, un scénario, un roman, retravailler leur premier jet, découvrir le tarot de l’écrivain… suivant ce que je propose. Souvent, il s’agit de cycles, c’est-à-dire qu’il y a 6 à 10 journées prévues.

L’idée est de proposer des exercices ludiques et créatifs pour inciter à découvrir son histoire et en parallèle de donner des outils théoriques sur lesquels s’appuyer. J’aime utiliser des cartes avec des dessins, des outils glanés dans les nombreuses théories du scénario… j’aime déstabiliser pour permettre au cerveau de se projeter ailleurs, de multiplier les possibilités. Bref, je propose un exercice, je donne un temps d’écriture et puis chacun.e lit ce que ça donne et on peut alors partager les effets que le texte provoque. Il y a des ateliers en présentiel et puis d’autres en ligne. Il y a les ateliers en groupe ou en individuel. Il suffit d’aller jeter un œil sur lechocdesmots.org pour découvrir les différentes possibilités.

Après Sitatunga et Vieux Os sortis tous deux en 2022, aurons-nous le plaisir de lire un nouveau roman prochainement ?

J’ai tenté de mettre de l’ordre dans les idées en ce début d’année 2023. Parmi les 17 idées sur lesquelles j’ai plus ou moins de notes suivant les cas, il y en a une qui caracole en tête de liste. C’est l’histoire d’une nana qui s’éveille le jour de ses 51 ans en décidant qu’il est temps de changer de signe du zodiaque.

Elle est Balance ascendant Scorpion. Elle a quatre enfants de quatre pères différents et sa vie est tout sauf un long fleuve tranquille. Elle en a marre de jouer les gentilles Balance, il est temps de s’affirmer en Scorpion. On la suit pendant 52 semaines rassemblées en 13 chapitres. J’en ai déjà écrit 7.
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