En septembre 2015, les lecteurs et les professionnels du livre ont assisté à l’arrivée sur le marché du livre numérique, de l’offre FeniXX.
Derrière ce nom évocateur le lecteur a la possibilité de trouver des milliers de livres publiés au 20e siècle qui étaient devenus indisponibles.
Ces livres étaient destinés à être dispersés, oubliés, grâce au numérique, ils retrouvent un second souffle.
Nous avons voulu faire le point avec Régis Habert , directeur de FeniXX, et effectuer avec lui un premier bilan objectif 3 mois après le lancement de ce projet titanesque.
Vous avez lancé les rééditions numériques du XXe siècle au mois septembre, quel bilan faites-vous 3 mois après le lancement ?
Le lancement commercial de FeniXX sur le marché français nous semble, avec un recul de 3 mois seulement, très satisfaisant.
L’année 2015 nous a permis de produire plus de 20.000 livres et de terminer l’année avec un catalogue « disponible » sur la plateforme Eden de près de 10.000 livres.
Le bilan de notre activité sur 2015 s’appuie sur trois constats essentiels pour la suite des opérations de la société.
Nous constatons tout d’abord que les professionnels de l’industrie du livre reconnaissent que les livres électroniques que nous produisons sont de bonne qualité ; une qualité qui va au-delà des standards fixés par la Sofia dans ses licences. Ce point particulier était l’un des challenges principaux à relever pour FeniXX pour ce démarrage : produire en masse avec un niveau de qualité optimale.
Par ailleurs, nous pouvons d’ores et déjà nous appuyer sur un réseau de distribution très solide pour commencer nos opérations commerciales. Plus de 80 libraires électroniques sont déjà ouverts et quelques autres sont en cours d’ouverture dans les jours/semaines à venir.
Enfin, la qualité des ouvrages proposés dans le catalogue FeniXX ne se dément pas. Nous numérisons toujours actuellement des livres issus de la liste ReLIRE 2013. Que les livres soient issus de la licence exclusive ou de la licence non exclusive, les « pépites » ne manquent pas et il y a vraiment des livres intéressants pour tous les publics.
Comment se portent les ventes ? Quel est l’accueil du public ?
Les ventes ont effectivement commencé et nous allons, comme nous l’avions annoncé, avoir vendu plusieurs milliers de livres sur les 3 derniers mois de 2015. Ces premiers résultats sont particulièrement encourageants pour FeniXX.
Ils ont en effet été réalisés avec un catalogue encore incomplet (8.000 livres disponibles seulement en moyenne sur la période de vente) et un réseau de distribution encore en construction (certains acteurs majeurs sont ouverts mais ne vont commencer leurs ventes qu’au début de 2016 comme Kobo et Apple).
De plus, FeniXX n’a pas encore véritablement démarré ses opérations marketing pour venir supporter les ventes des libraires. Des actions sont prévues pour donner rapidement des résultats.
Enfin, les ventes aux bibliothèques viennent juste de commencer et le catalogue de FeniXX est maintenant systématiquement proposé aux libraires à travers le dispositif PNB (Prêt Numérique en Bibliothèque).
Nous allons aussi pouvoir proposer aux bibliothèques des offres thématiques et des bouquets de titres adaptés à leur besoin dans les mois qui viennent.
Tout cela nous laisse beaucoup d’espoir pour le développement des affaires de FeniXX en 2016 et pour les années à suivre.
Il ne faut en effet jamais oublier que FeniXX est une entreprise dont l’action ne peut être jugée que dans la durée. Il est prévu, dans une première phase, de numériser et de proposer à la vente près de 200.000 livres sur une période de 9 ans.
Pour terminer sur ce sujet, nous constatons que les ventes de FeniXX s’inscrivent bien dans la logique de distribution dite « de la longue traîne ».
Près de 60% des titres vendus ne le sont qu’à un seul exemplaire. Il est bien entendu encore trop tôt pour tirer des conclusions définitives de ces premiers résultats, mais les tendances sont bien là.
On notera aussi que 10 titres ont été vendus plus de 10 fois, notre best-seller étant le livre de Erwan Bergot, Commando Vandenberghe (L’histoire d’un jeune combattant de la guerre d’Indochine, Roger Vandenberghe, cité en exemple au Corps expéditionnaire français par le général de Lattre de Tassigny) ; ce dernier coiffant sur le poteau le roman de littérature sentimentale La Maison des rossignols de Delly.
Quelles sont vos prévisions dans les 6 mois à venir ?
Il faut maintenant que le rythme de vente des livres indisponibles du catalogue FeniXX s’accélère. Nous comptons sur l’implication des libraires dans le développement de nos ventes ; et en particulier de la librairie indépendante française. Nous allons aussi nous appuyer sur les opérations commerciales et de communication que nous prévoyons de lancer.
Un rythme de 2 à 3.000 livres vendus par mois après 9 mois d’activité serait un excellent résultat pour FeniXX.
L’Europe est en train d’étudier la « validité de l’offre FeniXX », avez-vous des craintes ?
Les questions que se pose actuellement la Commission européenne ne sont pas vraiment aussi centrées sur FeniXX que pourrait le laisser entendre votre question.
FeniXX reste l’opérateur principal de la numérisation et de la commercialisation des livres indisponibles. Créée par les éditeurs et filiale du Cercle de la Librairie, FeniXX n’a cependant pas les compétences et la légitimité pour commenter les opérations juridiques en cours. C’est bien le Ministère de la Culture qui gère ce dossier et son évolution au niveau gouvernemental.
Compte tenu des réactions de la Commission, intervenues par exemple avec la communication de cette dernière au mois de décembre 2015, nous restons toujours confiants sur une issue positive de cette affaire pour le dispositif ReLIRE et par conséquent pour FeniXX.
Vous ouvrez une partie du catalogue FeniXX au prêt numérique en bibliothèques, pourriez-vous nous en dire plus ?
FeniXX est une société bâtie autour d’un projet technologique (la numérisation de masse et la commercialisation de livres électroniques).
Pour autant la société n’a aucune velléité à devenir une plateforme d’innovation dans la création de nouveaux modèles économiques pour le livre électronique. Dans ces domaines, la principale ambition de FeniXX est de participer activement à tous les programmes interprofessionnels mis en place pour développer le marché du livre numérique.
PNB constitue, actuellement, le meilleur exemple de ce type de projet qui fédère la plupart des acteurs du marché du livre numérique.
Nous avons annoncé, avec d’autres plateformes et diffuseurs, notre participation effective au programme lors des Assises du Livre Numérique du Syndicat National de l’Edition en novembre dernier.
Notre objectif est simple : ouvrir tous les livres du catalogue FeniXX à la possibilité du prêt numérique en bibliothèque. Cet objectif est d’ores et déjà bien engagé puisque sur un catalogue de titres FeniXX de près de 10.000 titres disponibles sur la plateforme Eden, 7.000 titres sont d’ores et déjà offerts aux libraires PNB pour qu’ils puissent les proposer aux bibliothèques.
A propos des DRM, vous travaillez à l’implémentation de protections allégées, quand est-ce que ce sera opérationnel ?
Comme pour le projet PNB, la mission de FeniXX n’est pas de se trouver en pointe dans la mise en place des projets technologiques innovants proposés par l’industrie.
Nous nous sommes réjouis de l’installation en 2015 d’un laboratoire européen pour la fondation Readium à Paris dont le Cercle de la Librairie est l’un des principaux acteurs. Dès que les technologies de protection allégées (Readium LCP – Lightweight Content Protection) seront disponibles, FeniXX évaluera en effet comment elles peuvent être implémentées sur ses propres livres numériques.
Il est bon de rappeler ici que les livres proposés par FeniXX ne comportent pas de DRM (en dehors de celles qui sont proposées dans le cadre de plateformes propriétaires capables de gérer des DRM). Les fichiers sont par contre tous tatoués (watermarking) pour limiter leur dissémination sauvage et illégale.
De plus en plus de librairies proposent les rééditions FeniXX, vous avez signé avec qui depuis septembre ?
Le réseau de distribution comporte aujourd’hui plus de 80 libraires actifs parmi lesquels les libraires des réseaux ePagine et leslibraires.fr. Le contrat avec Amazon est actif maintenant depuis le mois d’octobre dernier.
Les dernières signatures significatives concernent Apple, KOBO, Allbrary ainsi que d’autres partenaires électroniques importants comme Numilog et la société BooKeen par exemple.
On notera aussi la présence dans notre réseau en dehors de nos frontières de librairies comme Albertine à New-York, Zadig BuchHandlung à Berlin, Librel qui est le portail numérique des libraires belges et bien d’autres à venir encore …
Quelle est votre feuille de route pour 2016 ? Etes-vous optimiste ?
Plutôt que de parler d’optimisme, je préfère employer le terme de confiance !
FeniXX est une société qui est confiante dans sa capacité à produire en masse des livres numériques de qualité et à animer un réseau de distribution performant.
FeniXX doit maintenant faire passer son enthousiasme pour son catalogue au grand public. Et c’est là, probablement, le principal challenge de l’année 2016.
Les fondamentaux de FeniXX ne changent pas : d’un côté réussir son plan de développement commercial en collaboration avec les éditeurs, les libraires et les bibliothèques et d’un autre côté respecter un engagement patrimonial fort : numériser tous les livres indisponibles du XXe siècle afin de pouvoir les offrir à nouveau au plus grand nombre de lecteurs.